Batterie à moitié vide ou à moitié pleine? Les bons et les mauvais côtés du travail à distance à long terme

Woman working on her laptop

Comment établir des rapports significatifs dans un monde hybride

Il y a de fortes chances que vous lisiez le présent article tout en portant un pantalon en molleton. Je l’écris moi-même en pantalon en molleton, installée sur le canapé, bien après la tombée de la nuit (pour le meilleur ou pour le pire, c’est toujours pendant cette partie de la journée que mon cerveau passe à la vitesse supérieure). Heureusement, ce type de milieu de travail peu orthodoxe est de plus en plus courant, les environnements à distance et hybrides nous permettant de nous acquitter de nos tâches au moment, à l’endroit, de la manière et dans les vêtements de notre choix. 

Rien de nouveau. Le début de la pandémie remonte à maintenant trois ans, et les téléconférences Teams n’ont plus de secret pour la plupart des employés de bureau. Des recherches indiquent qu’en avril dernier, 46 % des Canadiens travaillaient encore à domicile au moins une partie du temps1.

Si le travail à distance présente des avantages indéniables (heureusement, car il semble que nous ne soyons pas près de retourner au bureau à temps plein), certains ont commencé à s’intéresser aux inconvénients de cette formule, en particulier pour les avocats en début de carrière, qui risquent d’avoir plus de difficulté à bâtir les types de relations professionnelles que les interactions en personne ont toujours permis d’établir.     

Cette situation a également des répercussions sur les associés. Dans son article « Please Don’t Go » pour CBA National Magazine, Doug Beazley indique que ces préoccupations jouent un rôle dans l’intensification de la guerre des talents. Il affirme que les avocats qui ne se sentent pas liés à leur environnement de travail sont plus susceptibles de chercher d’autres occasions. « Les collaborateurs débutants actuels ont passé la moitié de leur carrière en ligne », dit-il, citant Sameera Sereda, associée directrice de The Counsel. « Si les entreprises ne communiquent pas régulièrement avec ces employés pour avoir des conversations significatives sur leur travail, ils pourraient en venir à se demander pourquoi ils devraient se soucier du sort de leur entreprise. Après tout, à quoi bon s’en faire? »

Solitude à la maison

« Je pense sincèrement qu’il est difficile de commencer à travailler comme avocat de nos jours », affirme Sania Chaudhry, avocate spécialiste des droits des employés, du droit du travail et des droits de la personne chez Forte Workplace Law. Pour elle, le passage au travail à distance imposé par la pandémie a été brutal. « J’étais stagiaire en droit de la famille et de l’immigration à l’époque », raconte-t-elle. « Je me rendais au tribunal plus tôt que nécessaire simplement pour regarder d’autres avocats travailler, mais après le passage en ligne, tout a changé. Je ne croisais plus personne et je n’avais plus d’occasion pour discuter de tout et de rien. Bien entendu, on peut visionner les procédures à distance, mais ce n’est pas la même chose. » 

Elle s’est finalement tournée vers le droit du travail, et travaille actuellement à distance depuis son domicile de Calgary pour Forte Workplace Law, un cabinet basé à Vancouver. Bien qu’elle se souvienne avoir eu du mal à trouver des événements communautaires et des occasions de réseautage dans sa nouvelle spécialité au début, Mme Chaudhry souligne les avantages du travail à distance, en particulier pour une jeune mère : « Certains disent que si l’on est chez soi, il n’y a pas moyen de distinguer travail et vie personnelle, mais je ne suis pas d’accord. J’aime pouvoir voir ma fille plus souvent. Je peux la déposer à la maternelle, puis retourner au travail, au lieu d’être dans un bureau au centre-ville toute la journée. J’ai l’impression de jouer un plus grand rôle dans sa vie. » Elle ajoute que des recherches indiquent que les personnes racisées sont moins susceptibles de subir des microagressions dans un environnement de travail à distance2.

Camaraderie virtuelle 

Évidemment, le fait que son lieu de travail actuel accorde réellement la priorité à l’établissement de rapports entre les employés lui est bénéfique. Après tout, si le fait de travailler en solitaire à la table de cuisine jour après jour peut parfois être déprimant, il n’y a rien de pire que de se rendre dans un bureau bondé et de ressentir de l’isolement malgré tout. « Nos réunions sont vraiment significatives », déclare-t-elle. « Ce n’est pas le cas partout. Grâce à des éléments comme les bilans de bien-être et les discussions sur l’épuisement professionnel, nous sommes en mesure de bâtir des rapports avec nos collègues en parlant d’aspects de notre vie personnelle. » Forte Workplace Law dispose également d’un programme de mentorat structuré qui permet à Mme Chaudhry de discuter sur une base régulière avec un avocat expérimenté. 

Lorsqu’on lui a demandé si ces types de relations structurées peuvent réellement remplacer les liens organiques qui sont plus susceptibles de se former en personne, Mme Chaudhry a hésité, puis a affirmé que les deux sont importants. « Les mentors désignés sont bénéfiques. Ils aident les avocats moins expérimentés à comprendre le fonctionnement du cabinet ainsi que les attentes à leur égard. Je pense que l’une des choses qui compliquent le plus la vie des avocats à leurs débuts est le fait de ne pas savoir les attentes du cabinet. Il est aussi bon d’apprendre à connaître des personnes qui ne font pas partie du cabinet. On peut discuter avec elles d’idées qu’il peut être délicat d’aborder au travail, et se sentir plus à l’aise d’être soi-même en leur compagnie qu’avec des collègues. Sans ces types de rapports, je n’occuperais pas mon poste actuel. »

À qui incombe la responsabilité? 

« Selon moi, les avocats en début de carrière devraient s’efforcer d’établir des rapports », déclare Jessica Forman, avocate spécialisée en droit du travail et enquêtrice en milieu de travail chez Forte Workplace Law. Elle agit comme mentore pour Sania Chaudhry. « Évidemment, c’est facile à dire pour moi, comme je suis à l’aise dans ma carrière. Bien que les jeunes avocats doivent prendre l’initiative de nouer des rapports, les avocats plus expérimentés ont la responsabilité de les aider. »

C’est quelque chose que Forte Law ne prend pas à la légère. Au-delà des pratiques mentionnées par Mme Chaudhry, le bureau a clairement exprimé son engagement à l’égard des employés à distance en leur offrant de l’équipement de bureau à domicile confortable, y compris des ordinateurs portables, des fauteuils ergonomiques, des bureaux permettant le travail debout et plus encore. « La plupart d’entre nous travaillent quelques jours par semaine au bureau, mais deux de nos avocats vivent à une grande distance du bureau », explique Mme Forman. « Comme une de nos collègues n’a pas pu être présente à notre dernière fête de fin d’année, nous avons organisé une téléconférence Zoom avec elle et nous lui avons tout envoyé par courrier à l’avance, des jeux auxquels nous comptions jouer aux collations que nous allions manger. » Le cabinet a également mis en place une expérience d’intégration intensive ainsi qu’un programme de formation proactif afin de s’assurer que les nouveaux employés commencent du bon pied. 

Au-delà des heures facturables

Comme vous pouvez le constater, aucune de ces tâches n’est considérée comme du travail juridique « facturable », et ce n’est pas un accident. « Cela ne serait pas possible dans un environnement juridique traditionnel, mais nous sommes d’avis qu’il est important de veiller à ce que nos employés se sentent heureux, à l’aise et prêts à rester longtemps avec nous », déclare Mme Forman.

Elle souligne que l’isolement des nouveaux avocats pourrait ne pas être aussi directement lié au travail à distance que l’on pourrait le présumer. Après tout, le fait de se sentir désemparé, seul et peu sûr de soi dans une nouvelle profession date de bien avant la COVID-19, et l’ajout d’une journée d’ancrage hebdomadaire ne fera pas soudainement disparaître ce sentiment. Mme Forman raconte son expérience personnelle : « À mes débuts, je n’avais qu’un seul mentor qui prenait réellement le temps de s’asseoir avec moi pour m’expliquer les choses. Autrement, je me chargeais de menues besognes et j’observais les avocats travailler. On n’accordait pas la priorité au mentorat et à l’établissement de rapports, puisque les activités de ce genre ne sont pas facturables. »

Elle ajoute que même si les avocats commencent à parler de plus en plus de santé mentale et de bien-être, la portée de ces conversations demeurera limitée tant que l’on n’apportera pas de changements structurels au sein de la profession.  « Les entreprises qui croient réellement au bien-être doivent commencer à récompenser les activités non facturables qui favorisent réellement le bien-être de leurs employés. » Bien entendu, cela pourrait nuire au résultat net de l’entreprise, mais, selon Mme Forman, « le bonheur est de loin préférable à 10 000 $ de plus par an ».

Voir la batterie à moitié pleine

Si vous ressentez un certain isolement, sachez que vous n’êtes pas la seule personne aux prises avec ce sentiment. De nouvelles recherches indiquent qu’il semble y avoir un lien entre le travail à distance et des problèmes de santé mentale tels que l’anxiété, la dépression et l’épuisement, en particulier pour ceux et celles qui sont déjà aux prises avec ces problèmes3.

Il pourrait être bénéfique de tirer parti des avantages qu’offre notre nouveau monde « post »-COVID.  « J’aime pouvoir assister à des événements virtuels, par exemple en Ontario, sans avoir à payer et à organiser le voyage », explique Mme Chaudhry. « Cela a énormément contribué à ma carrière, à mon apprentissage et à mon réseau. » En outre, de nombreuses ressources sont offertes, telles que les associations provinciales d’avocats, dont l’Alberta Lawyers Assistance Society ou Assist, pour laquelle Mme Chaudhry fait du bénévolat dans le cadre de son programme de soutien par les pairs. « On peut les appeler pour discuter de n’importe quoi, que ce soit pour obtenir des conseils pratiques, avoir des discussions sur l’épuisement professionnel ou obtenir de l’aide à la mise en relation avec des personnes de votre région. » Il y a des organisations similaires dans tout le pays, et le site Web de l’ABC est un bon point de départ, comme il offre une liste à jour de ressources destinées à soutenir tous les membres de la communauté juridique du Canada.

Mme Chaudhry encourage aussi les étudiants en droit et les avocats en début de carrière à communiquer avec des contacts potentiels directement par courriel ou sur LinkedIn. « Cela peut paraître étrange, mais pourquoi pas? Les avocats adorent parler. Nous aimons parler de nous-mêmes. Je suis toujours heureuse de discuter avec quelqu’un et de lui venir en aide si possible. »

Mme Forman abonde dans le même sens et ajoute qu’elle reçoit très souvent des demandes similaires : « Je prends toujours le temps de discuter avec les gens par Zoom, par exemple en prenant un café. Bien sûr, certaines personnes refuseront votre demande, mais ne vous laissez pas décourager et vous finirez par trouver quelqu’un qui acceptera de vous rencontrer. »  Malheureusement pour les introvertis, les relations sont la clé de la profession d’avocat, et il n’y a pas moyen d’y échapper. Mme Forman recommande de consacrer du temps chaque semaine à l’établissement de relations, tant au travail qu’au sein de la communauté juridique dans son ensemble par l’entremise d’associations de barreaux ou de programmes de mentorat. « Encore une fois, je sais qu’il est facile pour moi de prodiguer tous ces conseils, et qu’il est beaucoup plus difficile de les mettre en pratique. C’est pourquoi je ne saurais trop insister sur l’importance pour les avocats expérimentés de combler le fossé. »

Retour au bercail

Le métier d’avocat est assez difficile à la base, et le fait qu’il puisse s’accompagner d’un sentiment de solitude ne facilite pas les choses. Qui ne s’est jamais remis en doute? Est-ce que je fais du bon travail? Est-ce que je travaille assez vite? Ai-je eu les bonnes expressions faciales lors de la réunion Zoom? 

Le fait de se sentir désorienté là où nous nous sentons normalement le plus à l’aise – à la maison – rend cette situation encore plus éprouvante. La bonne nouvelle, c’est que le fait de travailler seul de 9 h à 17 h n’a rien d’anormal. Environ 1 300 Canadiens obtiennent leur diplôme de droit chaque année4. Certains d’entre vous ont peut-être eu la chance de décrocher un poste dans un cabinet qui favorise le sens de la communauté, tandis que d’autres sont encore à la recherche d’un emploi. Quelles que soient les difficultés auxquelles vous avez fait face jusqu’à présent, persévérer en vaut la peine. Après tout, même si nous travaillons à la maison, il faut nous faire une place parmi les pairs, les collaborateurs et les mentors qui façonneront notre vie professionnelle.

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En savoir plus

 


Écrit par Frankie Barnet.

Source : 1. Ranstad Canada, Is work from home the future?, janvier 2023 2. Une recherche similaire est citée dans l’article du Washington Post « Microaggressions at the office can make remote work even more appealing », publié le 13 mai 2021. 3. Forbes, « Remote workers report negative mental health impacts, new study finds », octobre 2021. 4. Law Times, « Canadian Law Schools added 316 students and 35 tenured faculty over five years, says FLSC update », novembre 2019.