Le monde juridique est à l’origine de nombreux changements et tend à se diversifier. De nouvelles politiques et façons de faire en termes d’inclusion et de parité dans le milieu du travail font leur apparition dans de plus en plus de cabinets et contribuent à faire évoluer le visage de la profession. Les activistes, les groupes communautaires et les avocats et avocates sont ceux et celles qui rendent possible le progrès en transformant des idéologies progressistes, en lois. Un exemple simple mais significatif : l’été dernier, la communauté juridique a été témoin de la nomination d’une première femme autochtone comme juge à la cour suprême du Canada1, un exploit historique qu’il aura tout de même fallu attendre 147 ans.
Aujourd’hui, bien que les mots « inclusion » et « diversité » soient sur toutes les lèvres, ils sont encore trop souvent utilisés à tort et à travers pour plaire, contenter ou donner la fausse impression de vouloir faire partie de la conversation. En 2023, il ne suffit plus de se dire inclusif. Il faut d’abord et avant tout que l’inclusion fasse partie de la culture de son cabinet. Que l’égalité, la diversité et l’inclusion soient partie intégrante de sa pratique.
Moins de 1 juriste sur 10 est issu de la diversité
Au Québec, seul 9 % des avocats et avocates s’identifient comme étant issus de la diversité ethnoculturelle2. Ce pourcentage est « peu en comparaison avec la réalité démographique du Québec » et représente le taux le plus faible au pays, comparativement à près de 16 % en Ontario et de près de 17 % à l’international3.
Bien que le changement ait débuté, il reste encore beaucoup de travail à faire. Les préjugés, le racisme, ou les maladresses résultant d’un manque de connaissances envers les personnes issues de la diversité sont encore bien présents en société, comme au travail. Nous vous proposons différents outils pour faire de vous, un meilleur juriste et faire de votre cabinet, un meilleur milieu de travail.
POUR LES JURISTES
Se poser les vraies questions
Vous êtes-vous déjà retrouvé dans une situation où il semble y avoir une barrière invisible entre vous, votre client ou votre collègue? Bien que vous parliez la même langue, des codes invisibles créent de la distorsion dans vos interactions ou votre interprétation d’une situation. Si c’est le cas, peut-être devriez-vous revoir votre compétence culturelle dans vos communications interpersonnelles, tel que le suggère le Dr Milton Bennet. Selon lui, « [...] la compétence culturelle est l’habileté à fonctionner avec efficacité dans un contexte marqué par les différences culturelles et la capacité de s’adapter, d’accepter et d’interpréter un comportement propre à une autre culture que la sienne »4.
Pour évaluer cette aptitude chez un juriste, Dr Bennet définit 6 stades: le déni, l’attitude défensive, la minimisation de la différence, l’acceptation de la différence, l’adaptation à la différence et l’intégration de la différence. Autoévaluer son degré d’aptitude communicationnelle interculturelle permet d’avoir une meilleure conception de soi-même et de ses biais afin de les travailler et d’évoluer. Voici quelques avenues à explorer pour y arriver.
1. Faire preuve d’empathie
D’une culture à l’autre, les référents possèdent de multiples significations. Il est donc primordial de rester sensible et ouvert d’esprit face à la différence dans votre interprétation d’un geste, d’un mot ou d’une réaction.
2. Porter une oreille attentive à votre interlocuteur
Restez à l’écoute de la personne avec qui vous échangez. Bien que les codes diffèrent, certains codes verbaux et non verbaux peuvent vous indiquer clairement un malaise ou un questionnement. Prenez le temps d’adresser la situation et de questionner la personne qui se trouve en face de vous pour vous assurer de bien la comprendre.
3. Prendre le temps de s’autoanalyser
Face à la différence, nous avons le réflexe facile de penser que notre façon de voir les choses est la bonne et que l’autre est dans le tort. « Comprendre la manière dont votre vision du monde et votre culture influencent votre perception d’autrui vous aidera à relever les situations où vous auriez tendance à vous fonder sur des préjugés [...] »5.
Faites votre autoévaluation dès maintenant ici.
POUR LES CABINETS
La diversité, facteur de l’évolution de votre entreprise
Aujourd’hui, la diversité au sein d’un cabinet est essentielle, demandée et attendue. D’abord, parce qu’elle permet une représentation plus juste de la composition de notre société mais aussi et surtout parce qu’elle est nécessaire et résolument bénéfique pour l’ensemble des professionnels du droit.
Du côté de la clientèle, par exemple, la diversité devient un élément crucial et un prérequis pour plusieurs clients qui exigent désormais cette sensibilité à leur fournisseur de services juridiques. La diversité est non seulement pertinente mais elle est aussi indispensable à l’évolution des entreprises. « En effet, la pluralité de points de vue augmente la capacité d’innovation et favorise de meilleures décisions d’affaires en général » 6. Plus important encore, il a été prouvé qu’un milieu de travail inclusif améliore le bien-être global des employés et leur rétention. Deux éléments cruciaux auxquels il est particulièrement pertinent de s’intéresser dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre7.
Un outil pour mesurer la diversité au sein de votre cabinet
L’Association du Barreau canadien met à la disposition de la communauté juridique le guide Mesurer la diversité dans les cabinets d’avocats : un outil essentiel à un rendement supérieur pour accompagner les cabinets d’avocats dans leur pratique, évaluer leur rendement en termes de diversité et favoriser le changement au sein des entreprises.
À travers cet outil, diverses pistes de réflexion, conseils et renseignements sont offerts :
- conseils d’orientation sur le processus ;
- stratégies d’évaluation ;
- principales étapes de la mesure de la diversité ;
- situation actuelle des cabinets juridiques ;
- rôle que joue la diversité dans le rendement organisationnel;
- impact de diverses approches dans le cadre de la gestion de la diversité8.
La profession se doit d’agir et de changer. Sachez que le développement de vos compétences interculturelles est un processus en constante évolution qui peut s’avérer complexe et qui ne peut pas s’orchestrer du jour au lendemain. Comme l’affirme Jatrine Bentsi-Enchill, avocate, formatrice professionnelle accréditée et conférencière : « Votre engagement et votre désir d’amélioration seront les éléments clés de la qualité de votre service à la clientèle et du perfectionnement de vos talents d’avocat »9.
Nous pouvons vous aider.
Selon un rapport récent, le taux de roulement en matière d’avocats n’a jamais été aussi élevé, et de nombreux cabinets sont « dangereusement près de perdre 25 % de leurs associés ». Ce rapport suggère aussi que des salaires plus élevés ne constituent pas la solution. Les avocats travaillant aujourd’hui accordent une plus grande valeur à la culture d’entreprise et à l’équilibre des vies professionnelle et personnelle qu’à une augmentation plus traditionnelle. Discutez avec votre conseiller de la Financière des avocates et avocats au Québec du fait d’investir dans un régime d’avantages sociaux pour le personnel qui vous aidera à attirer, à récompenser et à retenir des talents diversifiés.
Sources :
2. https://espacea.ca/fr/articles/plan-equite-2022-2023/
3. https://www.barreau.qc.ca/media/3089/barreau-metre-2022.pdf (p.81)
8. https://www.cba.org/Publications-Resources/Practice-Tools/Measuring-Diversity-(1)
